mercredi 4 janvier 2012

Sur la cupidité - II


Lecture à partager : texte de l'essayiste Augustin Squella

Si à la même table, dînent un avare et un cupide, le premier résiste à payer sa part de l'addition, tandis que le second pense qu'en payant le propriétaire du restaurant, ses capacités d'acquérir l'endroit s'en voit diminuer. Lorsque le moment du dessert arrive, l'avare apportera dans un sac les restes du dîner afin de pouvoir souper gratuitement le soir venu, tandis que le cupide s'imaginera comment recycler et vendre à quelqu'un d'autre la nourriture qu'il n'a pas été en mesure de consommer.

L'avare a comme prétexte de vouloir faire des économies, mais le cupide dispose de mots qui ont encore meilleure presse pour dissimuler son vice : l'initiative, la capacité de travail, l'ambition, la compétitivité, ce sont quelques-unes des explications convaincantes que peut maintenant offrir un cupide, quand elles ne sont rien de plus que son brutal et incontrôlable appétit pour la richesse.

Personne n'aime les avares ni les cupides, mais un individu normal devrait mieux tolérer les premiers que les seconds, parce que les premiers ne font que rien ne leur donner, tandis que les seconds risquent probablement de leur enlever leurs biens.

Finalement, avares et cupides, mais surtout les descendants de ces seconds, trouvent un terreau fertile dans une société qui a remplacé sa préoccupation pour la pauvreté avec la recherche obstinée de la richesse et qui a essayé de guérir les stigmates des premiers avec la fascination des seconds.


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